dimanche 21 novembre 2010

l' inquiétant Bernard

Il est des figures tellement impressionnantes par leur stature qu'on hésite à les aborder de front...Considérons par exemple ce Bernard H.
Haitink ? certes, respectable chef d' orchestre...non, l' autre. Celui dont le nom sonne presque comme un pseudonyme...Herrmann.
Tout le monde connait les cimes de sa collaboration avec Hitchcock ( Psycho, Vertigo, North by northwest...) qui le situent parmi les plus grands ...


Et voici la question du jour : On joue aujourd'hui à l' économie de moyens : Combien de temps et d' instruments  faut-il à un véritable compositeur pour suggérer une ambiance, frivole et insouciante comme le gai sifflement d' un promeneur du dimanche, qui bascule en un rien de temps dans un climat d' épouvante ?
réponse : moins de 90 secondes.
La scene de Kill Bill se trouvant facilement sur you-tube, je reviens à la source, "twisted nerve", film anglais de 1968, de Roy Boulting .Ce titre pertinent résume bien le programme musical auquel nous convie fréquemment Herrmann au meilleur de sa forme.
Le générique contient avant le sifflement désormais ultra célèbre une progression de douze notes oblique et glauque typiquement herrmnannienne.Je ne sais pas ce que vaut le film, mais un extrait ensorcelé par la puissante musique d' Herrmann ( dont le début ici rapelle Vertigo ) suffit à garantir une forte émotion...
Il faudra réfléchir à l' utilisation du sifflement dans la musique de film. Vers 1968, Ennio Morricone s' en est déjà fait une signature; les héros sauvages et solitaires de l'ouest américains n'ont pas besoin de parler; de temps en temps un coup de feu et peut être un sifflement à cheval qui les humanise.Parce que quand on essaie de coller une musique de B.H sur un cavalier solitaire de l'Ouest, on peut obtenir ceci. ( au passage, magnifique musique composée pour un film mineur the night diggers).
Mais là où Morricone, même dans ses audaces, est fondamentalement quelqu'un d' équilibré,jouant toujours plutôt raisonnablement sur les contrastes,rajoutant des bzoïngs de guimbarde au milieu des morceaux mélancoliques,(Comme dans le clan des siciliens, mais ce n'est pas un cas isolé ; Ceci dit Morricone sait s' abandonner au lyrisme)  Herrmann n'est jamais aussi génial que quand il bascule vers le déséquilibre....et de ce point de vue, je ne connais pas de musique de film plus impressionnante que Psychose : uniquement des cordes et chacun peut sentir les archers crisser sur les nerfs de sa colonne vertébrale... Herrmann appartient fondamentalement à la lignée des compositeurs romantiques comme l' atteste cette splendide oeuvre de jeunesse.(il n' est guère à son aise dans le registre léger ou humoristique mais il a du métier ...)

Vous vous souvenez d' Anton Chigurh?
Dès qu' on a un personnage suffisamment trouble et inquiétant,un bon thème musical est infiniment plus efficace qu'une scène dialoguée pour planter le décor et suggérer le malaise lié à ce personnage. Un contributeur de you-tube a eu la bonne idée de proposer ceci. 2° exemple ici d' un nouveau genre rendu possible par you-tube : à un extrait de film, associer une autre musique que l'originale...rien de tel si le choix est bon pour redécouvrir les deux...
Pour ceux qui voudraient s' entrainer à siffler, mesurez-vous à ce jeune homme.

Je pourrais conclure en citant Cioran : "un excellent remède à l' ennui est la peur : il faut que le remède soit plus fort que le mal" - regardez la scène de la douche sans la musique....elle est bien moins impressionnante...

...Tchussss

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